De retour à la maison vers 18h, après avoir récupéré les enfants excités à la garderie, avoir cherché une place de parking, s’être énervé encore sur ces bambins qui se jettent devant la télévision et les jeux vidéo, avoir lancé les fourneaux… une mère exténuée, mais aussi un père éreinté par sa journée de clientèle qui est reparti chercher du pain in extremis… s’apprêtent à dîner en famille. Scène caricaturale, mais ô combien révélatrice de tensions quotidiennes qui ne permettent pas d’apprécier la vue, les arômes, le goût des aliments présents sur la table bien dressée.
Stress quand tu nous tiens !
Les études montrent que ce que nous cherchons en mangeant, c’est premièrement du plaisir, puis de l’énergie et enfin des nutriments (vitamines, calcium…). Au même titre que nos activités familiales, sociales, culturelles, sportives ; l’alimentation est une source de bien-être mais encore faut-il pouvoir en être conscient !
Depuis son enfance, le cerveau identifie les sucres dits rapides et les graisses comme des messagers antistress. Ces aliments font entrer dans le cerveau plus de tryptophane qui est un précurseur de la sérotonine (neurotransmetteur qui diminue entre autre l’anxiété et les tensions émotionnelles). Plus le stress est présent et plus ces aliments sont sollicités.
L’alcool, le tabac, les poussées colériques sont aussi des échappatoires, alors qu’à l’inverse les glucides lents, le magnésium, l’activité physique, les massages, la relaxation, le contact avec l’eau, les activités créatives… sont des outils à privilégier pour retrouver une relation plus sereine face au stress.
Nous avons la possibilité de choisir parmi toutes ces “drogues”, celles qui nous apportent un état d’équilibre avec en prime l’énergie et la santé. Alors pour éviter d’être dépendants aux plus nuisibles, choisissons de rendre familière les bonnes habitudes. Rompre ce cercle infernal qui nous emprisonne dans des comportements addictifs n’est pas chose simple.
Nos choix alimentaires, notre relation face aux aliments peuvent nous aider à atteindre cet objectif louable. Plus une catégorie d’aliments sera consommée régulièrement en mettant en avant ses bienfaits, plus elle nous sera affectivement proche. A l’opposé, des tensions quotidiennes, un manque de sommeil, de la fatigue, nous déstabilisent et nous attirent de nouveau vers des aliments sucrés et gras.
Arriver progressivement à enraciner les bons comportements alimentaires, expérimenter de nouveaux goûts et parfums, de nouvelles saveurs et textures sont des objectifs abordables mais qui demandent un investissement quotidien. Ces expériences répétées seront de plus en plus « endorphinisantes », sources de bien-être et gommeront notre vulnérabilité au stress.
Les bons choix alimentaires :
Se servir de l’alimentation comme un “médicament” antistress, c’est possible, mais cela ne se résume pas simplement au contenu de l’assiette. La préparation d’une table harmonieuse en couleurs, l’écoute d’une musique agréable, plutôt qu’une télé hurlante, des plats et assiettes richement assortis et servis sont des préliminaires qui aiguisent les papilles et aident à trouver une certaine sérénité autour d’un repas.
Prendre quelques instants pour soi avant de passer à table, mais surtout prendre le temps de regarder, de sentir, de goûter le repas, sont incontournables. La vitesse est l’ennemi n°1 du plaisir gustatif. Penser à ces œnologues qui admirent la robe d’un vin, la finesse de ses premiers effluves, la richesse et l’intensité des sensations avant sa mise en bouche…
Profitons de cette rencontre alimentaire pour chasser une partie de nos doutes, de nos peurs… afin de sortir de table plus léger et tonique. Des expériences rapportent que le stress accentue la quantité de nos prises, et nuit fortement à la qualité. Cette équilibre entre nos besoins réels et nos apports, est maintenue par nos “hormones de l’appétit”, tant au niveau du système nerveux central que des organes du système digestif.
Le stress chronique influe plus ou moins directement sur ces médiateurs. Depuis la mastication, en passant par les récepteurs volumétriques de l’estomac, les sécrétions pancréatiques d’insuline, mais aussi depuis nos hormones thyroïdiennes, notre tissu adipeux, nos intestins… de nombreuses substances informent notre cerveau pour contrôler l’appétit et notre sensation de plaisir… et inversement.
Citons par exemple le cortisol et l’adrénaline, ces “hormones du stress”, sécrétées par nos glandes surrénales : plus de stress, plus de cortisol et d’adrénaline ! Elles élèvent notre taux de sucre sanguin, car le stress engendre un besoin énergétique plus fort. Ceci se répercute sur notre sécrétion d’insuline et par voie de conséquence, sur nos métabolismes d’où une prévalence plus forte de syndrome métabolique, de diabétiques et d’hypertendus chez les personnes stressées. Ces à-coups dans notre vie quotidienne empêchent aussi la leptine (une hormone de découverte récente sécrétée par nos cellules graisseuses), de signaler à notre cerveau que nous sommes rassasiés. Une bonne signalisation de la leptine calmera notre appétit, évitera le stockage des graisses et favorisera leur élimination.
Face à cette complexité régulatrice, sélectionnons dans les aliments, le plus souvent possible, les boucliers antistress qui nous envoient des signaux rassurants. Parmi les plus connus, citons celui qui fait saliver plus d'un gourmand : le chocolat noir ! Cet aliment plaisir est riche en flavonoïdes, aux vertus relaxantes, et contient également de la phényléthylamine, une substance bonne pour le moral. Il me sera facile de vous convaincre qu’un à 2 carrés par jour de cacao à 70 % sont de bons alliés.
Privilégions les poissons gras (sardines, maquereaux, saumon… ) riches en oméga 3 qui facilitent la production de sérotonine et font chuter les taux de cortisol et d'adrénaline. Les noix, qui, en plus de leur richesse en oméga 3, aident à réduire la pression sanguine mise à rude épreuve par le stress. Les aliments riches en magnésium, comme par exemple les épinards, les amandes, les haricots rouges, les lentilles… mais aussi les eaux minérales, type Hépar®, Contrex®, qui sont des atouts indispensables à la réduction de la sensibilité et de la réactivité au stress. Pour terminer cette liste non exhaustive, je citerai la famille des fruits rouges qui par leur richesse en antioxydant vont aider nos signaux internes à mieux fonctionner.
A la lecture de cet article je vous sens impatient, de découvrir ou redécouvrir sous un autre angle votre assiette et tout ce qui l’accompagne, de profiter de son contenu, non pas comme un simple remplissage stomacal qui nous venge de nos frustrations, mais comme la possibilité de devenir notre propre chef d’orchestre dans ce domaine.
Pascal Guerit
Docteur en Pharmacie
DU de Diététique et Nutrition
Formateur Echoform et
Responsable Développement des programmes
Licencié au Cycloclub St-Loubès
Réf. : “Okinawa” Dr JP Curtay
Ed. A. Carrière