Notre tube digestif est un peu le « petit oublié » et pourtant il ressent nos émotions, nous accompagne silencieusement dans la digestion, filtre nos « ennemis », nous protège, nous « parle » en nous signalant des tensions, des sensations. Ne dit-on pas « Avoir l’estomac noué », « Avoir la peur au ventre », « Ne pas se faire de bile », nous somnolons après le déjeuner…

Ce magnifique tube digestif qui sillonne notre corps de la bouche à son extrémité terminale n’a pas fini de nous étonner. L’une de ses principales fonctions est la digestion mais cet appareil est en étroite relation avec notre cerveau. Notre « plafond cérébral » est renseigné en temps réel sur tout ce qui pénètre par la bouche. Sécrétions, transformations, passages membranaires, synthèses, bactéries pathogènes… rien ne lui échappe !

La complexité de ces relations étroites fait intervenir de nombreux tissus et médiateurs : Tissu lymphoïde ou immunitaire, foie, pancréas, hormones, médiateurs chimiques… Tous nos besoins, toutes nos atteintes les mettent en jeu collectivement pour préserver un équilibre si difficilement acquis.

Durant une vie toute entière, les experts chiffrent la quantité de nourriture ingérée à environ une centaine de tonnes. 80 ou 120 tonnes selon vos gourmandises, voici le point central sur lequel nous pouvons agir pour apporter à nos entrailles, ce qu’elles affectionnent le plus et réduire au maximum les matériaux sensibles.

Encore une fois la nourriture est en 1ière ligne, une nourriture saine, digeste, exempt de polluants. Heureusement que la salive, nos sécrétions gastriques très acides et après elles nos bactéries intestinales sont des remparts aux toxines bactériennes en particulier. Même si leur vigilance peut être prise à défaut, certaines fibres nerveuses bien informées savent stimuler nos muscles digestifs pour que ce bol alimentaire « avarié » fasse le chemin inverse !

Une fois cette ligne de défense passée, nous pouvons profiter des éléments nutritifs que notre fourchette a su porter à notre bouche. Ces nutriments sont essentiels pour nos tissus, nos organes mais avant tout à notre système digestif qui est un gros consommateur d’énergie. Variable selon les niveaux, notre tube digestif a une croissance soutenue, c’est-à-dire que son renouvellement cellulaire est rapide d’où son besoin propre en « matériaux constructifs » et en énergie. Si le « chantier » est bien approvisionné mais que les ouvriers sont en retard ou distraits, la maison cellulaire ne pourra avancer.

Alors quels sont les aliments préférés de notre tube digestif pour qu’il soit en pleine forme ?
Difficile de hiérarchiser mais sans le monde végétal, point d’équilibres !

Les fruits, légumes verts, secs, crudités, légumineuses, céréales complètes, épices, aromates… nous apportent toute la richesse de la nature et cela depuis la nuit des temps. Nos muqueuses apprécient leurs oligoéléments, leurs Polyphénols protecteurs et nos bactéries raffolent de leurs fibres qu’elles consomment sans compter. Car il faut les nourrir ces centaines de milliers de milliards de bactéries. Affamées, à la diète ou sans leur plat favori, c’est la porte ouverte à celles moins exigeantes mais plus agressives qui pourraient prendre le dessus et créer un désordre intestinal certain. Les produits de fermentation de ces fibres vont générer des substances indispensables à notre paroi intestinale, à la formation du mucus qui la protège et sont utiles également dans la signalisation du métabolisme des glucides, des graisses et du cholestérol.

A l’inverse les sucres raffinés, les sucres « blancs » sont davantage appréciés d’une flore généralement privée de bonnes fibres par ces milliards de bactéries qui « se servent en premier !».  Ces bactéries « inhabituelles » font alors le lit aux dysbioses ou déséquilibres responsables à leur tour de ballonnements, d’irritation, d’inflammation, de malabsorption…  

Comme cela vient d’être confirmé récemment, la faiblesse de notre alimentation en fibres associée à un excès de protéines animales, surtout les viandes rouges et les charcuteries, à leurs modes de cuisson souvent agressifs et certains modes de conservation; vont engendrer une production de composés irritants principalement au niveau de notre côlon.

La proportion plus forte en fer des viandes rouges, leur assimilation certes voisine de 20% mais 80% restent tout de même dans les intestins et donc son pouvoir oxydatif produirait un surplus de radicaux libres ouvrant la porte à des désorganisations cellulaires.

L’alcool et son démoniaque voisin, le tabac, sont des facteurs favorisants les déséquilibres. Le tabac initialisant des lésions primaires qui sont susceptibles de se cancériser et l’alcool contribuant à l’augmentation de leur taille. Si un contexte anxiogène vient couronner le tout c’est la catastrophe pour notre tube digestif. De l’œsophage en passant par l’estomac, les intestins, le côlon, le rectum, les veines hémorroïdaires… tout s’irrite et nous aussi par la même occasion. Ce cercle vicieux est bien connu et pour y remédier, ne sortez pas une nième cigarette à « griller » mais plutôt vos baskets ou la laisse du chien pour respirer le bon air salvateur d’une activité physique quotidienne.

Le stress engendre aussi un terrain plus acide. Cette acidité à son tour agresse nos muqueuses et ralentit nos métabolismes. Lors d’un épisode stressant, des sécrétions hormonales viennent activer et entretenir ce paramètre acide. Les aliments dits « acidifiants » sont aussi responsables, mais pas coupables à eux seuls! Citons les protéines animales, les céréales, les fromages, les aliments raffinés comme pourvoyeurs d’acides alors qu’encore une fois le monde végétal (Excepté les céréales en trop grande quantité et surtout celles qui sont raffinées) offrent un terrain, un « terreau » plus favorable à nos cellules digestives avides de bienveillance.

Si vous ne souhaitez pas que votre tube digestif vous envoie des messages erronés, offrez-lui régulièrement les cadeaux qu’il apprécie le plus. Guy Bedos disait « L'avenir est aux peuples qui resteront unis, qui ne se feront pas de guerres intestines et qui sauront s'assurer de la liberté de leurs alliances ». Il ne croyait pas si bien dire en parlant d’alliances positives et de guerres intestines !

legumes 


Pascal Guerit
Docteur en Pharmacie
DU diététique et Nutrition